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Dr Nicole ATHEA - Parler de sexualité aux ados

Eyrolles 2006

p.5 Arrivée du sida et d’une vision hygiéniste de l’éducation sexuelle … «A la recherche de sens sur les comportements se substituait une attitude hygiéniste du point de vue de la santé et permissive du point de vue de la sexualité.»

 

p.7«Les adolescents ont des besoins en matière d’éducation à la sexualité… Les images à connotation sexuelle au milieu desquelles ils vivent, diffusent des messages implicites qui, s’ils ne sont jamais décodés, sont cependant absorbés. Nous nous devons, en tant qu’adultes, de faire contrepoids à ces messages, car ils véhiculent de nouvelles normes sociales.

p.13 Dans notre monde occidental,qui a pour objectif la consommation, le sexe constitue le support essentiel de la publicité et de la vente. Il est réduit à être le moteur de désirs à assouvir en consommant. Pour les jeunes, qui ont une curiosité sexuelle importante et qui vivent de grandes tensions liées à l’envahissement de leur corps par des pulsions sexuelles, le fait d’évoluer dans un climat d’excitation permanent ne favorise pas l’intégration sereine de leurs pulsions. En effet, ce contexte renforcerait plutôt les passages à l’acte et les comportements impulsifs.

…le sexe devient aussi un objet de consommation comme les autres et perd beaucoup de sa capacité à créer du lien…et…est de plus en plus dissocié de l’affect…. Et pourtant, c’est bien là un enjeu essentiel de la démarche de prévention que de rétablir le lien entre le sexe et la personne, et d’aider les adolescents à sortir de cette image d’une sexualité morcelée, réduite à un phallus en érection qui éjacule.

 

p.15 « Chacun fait ce qui lui plaît »….Les questions du « pourquoi je le fais….les questions du sens , ont été totalement occultées.La conception de l’amour, comme une relation de respect, de confiance et d’acceptation de l’autre et de soi, qui impose des concessions bilatérales, n’est pas compatible avec la possibilité de «faire tout ce qui nous plaît»

Par ailleurs, le message qui dit «fais ce que tu veux, mais avec un préservatif», ne sera pas efficace dans la durée. Si l’estime de soi se dégrade au fil des expériences du corps, la prévention ne pourra plus prendre de sens.Si une jeune-fille pense qu’elle est devenue « un trou », le fait de se protéger n’a plus de sens pour elle, agresser son corps à travers une sexualité à risque pourrait même devenir pour elle un but...

 

p.31 Pour ce qui est des filles plus âgées, une grande majorité de celles qui ont vécu leurs premières expériences sexuelles précocement ne manquent pas de souligner que c’était trop tôt, qu’elles n’étaient pas prêtes à en affronter les conséquences, tant sur le plan affectif que sur celui de la protection des rapports..

 

p.45 Repenser la manière de s’adresser aux adolescents. ... à ne prendre en compte de la sexualité que le pôle négatif de ses dangers, les adolescents risquent de ne plus le supporter, et à juste titre de ne pas vouloir entendre. Leurs préoccu-pations liées à l’entrée dans la sexualité sont beaucoup plus vastes. Il est impératif de répondre à leurs préoccupations.. Ce travail de réflexion doit leur permettre de donner du sens à leurs comportements..

 

p.70 Vigilance avec les chiffres : moyennes statistiques qui..fonctionnent comme de nouvelles normes. (il faudrait) s’opposer aux pressions sociales qui jouent comme des contraintes sur la sexualité des jeunes, alors qu’elles sont souvent présentées comme de nouvelles libertés.

 

p.88 Rôle des adultes. ... aider les adolescents à se confronter aux enjeux essentiels de leur vie relationnelle. L’adolescent doit pouvoir comprendre les implications des relations sexuelles durant l’adolescence, l’importance d’assumer ses choix face aus pressions sociales diverses, l’influence des médias, la pornographie, l’incitation des pairs,etc. Il doit pouvoir réfléchir aux attentes et aux exigences que comporte la relation de couple.

 

p.101 Les inciter à réfléchir de façon individuelle:

  • Qu’est-ce que ça peut signifie pour moi d’engager mon corps?
  • Qu’est-ce que j’en attends ? Est-ce bon pour moi?
  • A quoi cela peut-il me servir d’attendre encore avant de «le faire»?

 

Banalisation du sexe et idéalisation de la jouissance. Paradoxalement, alors que l’acte sexuel est socialement banalisé, la jouissance sexuelle est complètement idéalisée. L’acte est de plus en plus limité à lui-même, coupé de toute référence à des sentiments ou à un engagement amoureux… Ce clivage du sexe et des sentiments, et cette idéalisation de la jouissance sexuelle sont responsables d’un décalage entre ce que les adolescents attendent de l’acte sexuel et ce qu’ils vivent... Les normes sexuelles deviennent de plus en plus contraignantes, alors que la sexualité se voudrait de plus en plus « libérée ». On observe ainsi:

  • des normes quantitatives ( Combien de fois faut-il le faire ? Combien de temps ça dure ?)
  • des normes de «faire»(Comment le faire? Faut-il que je fasse une fellation? Faut-il que j’avale le sperme? Dois-je accepter la sodomie?)

 

p.137 L’idéalisation du rapport sexuel et la banalisation de l’engagement du corps sont les deux termes de la contradiction dans laquelle les adolescents sont pris.

 

p.143 Aborder avec les adolescentes les plus jeunes la question du sens de l’entrée dans la sexualité est bien plus pertinent que de parler d’emblée de moyens de protection…

 

p.144 Avoir des relations sexuelles pour être «comme tout le monde» ...les pressions qui pèsent sur (les filles) jouent un rôle important dans l’engagement du corps. La fameuse moyenne statistique de 17 ans au premier rapport est devenue une nouvelle norme, tout aussi impérieuse qu’autrefois les normes de virginité au mariage. Les adolescents sont nombreux à penser que si l’on est encore vierge à 17 ans, c’est qu’on n’est pas vraiment normal…

 

p.151 Des filles jeunes peuvent se sentir contraintes à avoir des relations sexuelles parce qu’elles ont une contraception qui leur assure une disponibilité sexuelle permanente sans risques. L’envie en permanence est devenue un nouveau critère de normalité…. D’où ..nécessité de trouver une cause somatique qui leur permette de dire « non » sans passer..pour des filles frigides.

 

p.154 Dissociation du sexe et de l’affect. On peut alors réfléchir avec les adolescents sur ce mode de relation qui prend désormais tant de place dans la conception sociale du « faire l’amour » : si l’autre est un « objet-corps » pour moi, suis-je prêt à accepter d’être un « objet-corps » pour lui ? …. Chacun peut-il utiliser l’autre parcequ’il a son accord ?.... «Ce que l’homme a de plus profond, c’est sa peau» écrit Paul Valéry.. ... si la société idéalise le sexe, elle neutralise totalement l’impact et les conséquences éventuelles d’une relation charnelle.

 

p.160 L’amour. Les adolescents le définissent comme un attachement profond qui pourrait succéder à une période de sentiment amoureux ou de passion amoureuse. Selon eux, il exige la connaissance et le respect de l’autre, des valeurs partagées et une acceptation de l’être aimé, tel qu’il est réellement, avec ses qualités et ses défauts. Il fait intervenir la notion de temps et la volonté de construire,et concerne deux adultes qui s’acceptent. Défini ainsi, l’amour pourrait être le sentiment de base à l’origine du fondement d’une famille….Il est important de leur laisser entrevoir cet avenir-là, si différent des couples « kleenex » (on prend, on jette) fondés sur le seul sentiment amoureux….La société actuelle, qui ne leur donne comme modèle qu’un couple fondé sur le désir et le sentiment amoureux, les prépare bien mal à une vie de famille et de couple.

 

p.165 Nombre de tentatives de suicide d’adolescentes ont lieu après une rupture sentimentale.

 

p.169 Les pratiques homosexuelles concernent 1% des adolescents de moins de 18 ans.

 

p.222 Grossesses et contraception. Nous devons tenir compte des limites de l’action de prévention : s’il existe une sexualité adolescente, il existera toujours des grossesses.

 

p.240 Informer ne suffit pas. ... incapacité à intégrer une information ou la mettre en pratique plutôt que véritable carence d’information. Tous les adolescents connaissent aujourd’hui le préservatif et son rôle contraceptif ; tous savent la nécessité de l’utiliser pour tous les rapports ; une grande majorité d’entre eux connaissent l’existence de la contraception d’urgence, et tous connaissent l’existence de la pilule « classique » et la nécessité d’une prise régulière. Donc, si on veut diminuer le nombre de grossesses non planifiées, il va falloir travailler autrement que sur la seule information des moyens de protection.

 

p.250 «Tu peux/dois faire l’amour, mais tu ne dois pas avoir un enfant », tel est le message implicite de la liberté sexuelle offerte aux adolescents. Penser que la seule information contraceptive et la diffusion des moyens de contraception puissent parvenir à ce but, c’est ne pas voir tous les enjeux psychiques de ce nouveau pouvoir à l’adolescence.

 

p.265 En conclusion, dès lors qu’il existe une sexualité « mise en actes » à l’adolescence, il y aura toujours un nombre incompressible de grossesses non prévues. Certaines aboutiront à une naissance, d’autres-les plus nombreuses, à un avortement, et ce quels que soient les efforts de prévention pour améliorer la diffusion et l’accessibilité de la contraception.

 

p.273 La problématique des performances sexuelles dans laquelle sont embourbés les adolescents est notamment liée aux représentations de l’acte sexuel offertes par la pornographie.

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